Nominée 2023
Luísa Tormenta
ECAL Lausanne
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Luísa Tormenta, née en 1996, est une créatrice d’images multidisciplinaire qui travaille dans les domaines de la photographie, de l’imagerie numérique et du graphisme. Elle est titulaire d’un diplôme en communication visuelle de l’ESAD, et termine actuellement son master en photographie à l'École cantonale d’art de Lausanne (ECAL). Son travail investigue les expériences d’intimité et de connexion humaine dans les environnements numériques. Elle utilise une combinaison de photographies, d’imageries générées par ordinateur et de manipulations numériques pour incarner des récits sous forme d’installations vidéo ou d’images fixes. |
Can I hear from you?, 2022
Avec l’installation vidéo Can I hear from you?, Luísa Tormenta explore la fragilité des relations numériques. Elle s’est inscrite sur un site web de correspondance numérique, où les utilisateurs, à la recherche d’amitiés sérieuses sur le long terme, échangent des courriers digitaux. Elle s’est mise à écrire chaque semaine à une inconnue. Par le biais de cette tentative de développer une amitié exclusivement en ligne, elle a évalué les limites des communications dématérialisées et de l’empathie.
Cette expérience, qui a rapidement atteint ses limites, a nourri ses réflexions sur l’impact des outils de communication numérique sur les relations humaines. Elle a observé comment l’écran peut agir comme un confessionnal, sans responsabilité ni conséquence dans nos vies tangibles. Elle a remarqué que le besoin humain fondamental de connexion émotionnelle est menacé lorsque les dispositifs numériques agissent comme des boucliers, des barrières ou des masques, et que la force de l’empathie humaine est dispersée par des simulations de relations qui nous laissent un sentiment d’absence de lien, lequel finit par se transformer en perte.
Au fil de cette expérience, elle a transposé les conversations avec sa correspondante dans un espace numérique. Elle a téléchargé un avatar humain 3D préfabriqué pour incarner son amie, en utilisant un modèle choisi au hasard, afin d’imiter l’absence de tout critère qui l’avait menée à sa correspondante. Elle a également réalisé des scans 3D d’elle-même. Dans l’installation vidéo, ces deux personnes tentent d’interagir l’une avec l’autre, de se tendre la main, mais elles ne se touchent jamais tout à fait, tandis que des bribes de leurs conversations apparaissent à l’écran. Alors que l’avatar 3D préfabriqué est sans défaut, les scans de l’artiste comportent des erreurs et des fragmentations qui font écho à sa fragilité humaine, ce qui, pour elle, représente la manière dont une personne peut être plus vulnérable, plus ouverte et plus blessée lorsqu’elle est en ligne, sans que cela ne soit jamais visible sur l’image externe de son corps physique. Les scènes de la vidéo imitent la non-linéarité de toutes les relations humaines, avec des déceptions, des vulnérabilités, du soutien, des pas en avant et en arrière dans la relation. La vidéo est accompagnée d’un son d’ambiance apaisant, basé sur l’enregistrement d’une salle de serveurs, faisant allusion à l’inévitable physicalité des appareils qui permettent les relations numériques.